mercredi 13 septembre 2017

Education bienveillante et réajustements.





Ce soir, j'ai envie de faire un petit point sur l’éducation bienveillante!

Parce qu’appliquer la parentalité positive quand on ne dort que quelques heures (le plus petit ayant décrété que faire ses nuits, c’était so mainstreamet que la plus grande, en pleine crise des trois ans, teste outrageusement tes limites à tout bout de champ… eh bien c’est sportif, oui oui ma bonne dame.

Et ça permet de prendre du recul sur pas mal de choses, de voir ce qui fonctionne et ce qui fonctionne moins, de réaliser qu’il y a des idées supers en théorie et pas du tout en pratique, etc… En voici quelques bribes, quelques pistes de réflexion.

Alors... Par où commencer? Ah oui!

Trop de choix tue le choix.

Oui.

Jusqu’alors, je laissais à ma fille une très large liberté de choix au quotidien, croyant bien faire, mais... sans imaginer qu’il pouvait y avoir un revers à la médaille. 

Être une maman à l’écoute, qui offre à son enfant la possibilité d’être acteur dans la prise de certaines décisions qui le concerne est non seulement génial, mais en plus, crucial dans sa construction en tant qu’individu qui fait ses choix et en comprend les conséquences. Mais. A mesure des expériences, quelque chose me pousse à dire qu’il y a des limites dans cette méthode, et qu’il s’agit de trouver un équilibre.

Je m’explique : notre enfant compte sur nous, parents, pour développer chez lui un sentiment de sécurité. Alors mettons-nous donc à leur place, comment se sentir tranquillisé lorsque l’adulte, le repère, le guide, donne l’impression de compter sur l’enfant pour faire le choix à sa place, voire qu’il ne sait pas lui-même quoi décider ? Ajoutons à cela la pression de la surinformation, qui entraîne à coup sûr la crainte, face à trop de choix, de ne pas faire le bon. Alors en croyant respecter son petit bout, on finit par l’égarer.

Quotidiennement, je demandais à ma fille comment elle voulait s’habiller ce matin, ce qu’elle avait envie de manger, où elle avait envie d’aller à tel moment, faire plutôt ou plutôt ça, etc. Et je sentais croître une certaine nervosité là où il me semblait qu’elle avait une porte grande ouverte sur de merveilleuses opportunités. En fait elle avait juste besoin de se sentir aiguillée, et se fichait pas mal d’être consultée sans arrêt. Pire, en fait, ça l’angoissait...

Donc à force de discuter avec d’autres parents qui fonctionnent comme nous, et tombent sur le même constat, mais aussi avec mes propres parents, j’ai décidé de rectifier un peu le tir. 

Laisser son enfant crouler sous une montagne de choix, ok, ce n’était pas la meilleure chose à faire. Mais tout décider à sa place, n’est pas bon non plus. Ma fille n’est pas un chien à qui je vais donner des ordres, elle m’obéit parce que ça a du sens, pas parce que « c’est comme ça, c’est moi qui décide, point »

Alors à force de tâtonner, on a instauré quelque chose de nouveau : chaque matin on liste nos « besoins du jour », pour avoir un peu le choix de ce qu'on a envie de faire dans la journée. Deux ou trois, pas plus. Souvent ce qui revient chez elle, c’est "lire telle histoire, jouer, être avec toi." Du coup moi j’évoque plutôt des trucs d’adulte (pas toujours le choix en même temps hein) bref des impératifs du type « faire la vaisselle ou désherber telle butte » pour que ça puisse être fait, mais en y ajoutant un petit truc fun qui rejoint son besoin de jouer. On trouve à peu près l’équilibre comme ça dernièrement, et notre quotidien a moins des airs de champ de bataille. En parallèle, elle a toujours de petits choix, du type voir si elle veut porter un manteau ou si elle estime qu'il fait chaud, par exemple. Mais on aiguille davantage, on balise le chemin, en quelque sorte. Et ça a l'air de porter ses fruits.

D’autres choses qui fonctionnent bien, sinon : restreindre le choix, par exemple ne plus avoir qu’à décider entre deux choses, mais aussi accompagner la réflexion dans la prise de décision, et surtout, proposer des choix qui ne concernent QUE l’enfant, rien qui n’implique une responsabilité (même minime, ça peut peser lourd sur de petites épaules) ou quoique ce soit d'extérieur.

Voilà pour le petit enseignement que j'ai reçu récemment.

Illustration : Wonderjane

On apprend en même temps que nos enfants. Et justement...

L'éducation positive construit des enfants qui s'éloignent des normes de tous les jours.

Oui. Ça fait des enfants bruyants, émotifs, qui n'ont pas peur de s'exprimer, qui cassent un peu la baraque. Ils passent souvent pour des mal élevés ou des casses-pieds. Ça demande de s'accrocher, d'y croire, de sentir que ça leur réussit et que ça leur servira plus tard. Malgré les regards sceptiques ou les remarques désobligeantes.

Sans oublier, comme une amie que l'a un jour fait remarquer, qu'appliquer l'éducation bienveillante, ça doit aussi passer par être bienveillant avec soi. Comment agir en toute sérénité si on manque d'empathie avec soi-même? Si on s'oublie, si on est hyper rigides? Ça ne peut pas fonctionner. On est juste humains, on fait des bourdes, on va en refaire, et ça ne fait pas de nous de mauvais parents.

Il y a toujours des moments de doutes, qui eux aussi, poussent justement à la réflexion. Surtout quand on est plusieurs mamans à échanger sur le sujet, à s’interpeller, à ouvrir le débat.

"La bienveillance, j’ai essayé et ça ne marche pas, regarde !"

La maman qui m’a dit ça il y a peu venait d’être confrontée à une grosse crise de la part de son enfant de quatre ans, du type « je me roule parterre à la moindre frustration et je pousse des hurlements à glacer le sang » (Peace, la mienne fait pareil) La maman a essayé de lui parler calmement et factuellement… ça n’a pas marché. L’enfant a tenu tête et la situation ne s’est pas débloquée. Elle était très remontée contre « tous ces discours bienveillants à deux balles ». Mais après coup on en a discuté toutes les deux à tête reposée et nous sommes parvenues je crois à soulever l’un des nœuds du problème. Cette maman a admis qu’à ce moment de crise –comme souvent d’ailleurs- elle était bienveillante uniquement en façade. En gros, elle applique la parentalité positive mais tout en transpirant l’envie de meurtre au couteau à beurre. Résultat, elle s’adresse mécaniquement à son enfant, sur un ton faussement doucereux et tout en tremblant de nerfs ; et ça, il le sent, ça le déstabilise complètement, voire même le pousse à chercher les limites un peu plus loin encore, jusqu’au point de rupture. Bref on en a conclu l’une comme l’autre qu’une façade bienveillante est pire qu’une maman qui assume ses émotions de l’instant et se met à crier.

Comme dans toute situation, c’est un coup à prendre, réussir à ne pas se laisser déborder ni envahir par ce que cela suscite de négatif en nous, respirer à fond, accepter les choses comme elles viennent. Une fois sur trois, je n’y parviens pas hein, ce n’est pas une leçon de morale mais simplement une piste de réflexion. Tu m’étonnes, hein, quand tu essuies une crise cataclysmique (devant témoins, pire…) c’est difficile de ne pas se sentir submergé.


Dessiner pour enrayer une crise de colère nous a récemment beaucoup aidés. J'ai proposé, à tout hasard, à ma fille au visage rubicond et aux sourcils froncés, qui venait de faire une grosse crise chez un couple d'amis, de "dessiner sa colère" sur de grandes feuilles. Elle a pris ses craies rouges et noires, elle a gribouillé sur de grandes feuilles, "un gros orage de tempête de colère!". Puis sur une autre, elle s'est dessinée, avec son petit frère posé sur sa tête, parce que "quand même des fois il prend toute la place..." Puis un dernier dessin d'une grosse rivière, là elle a beaucoup pleuré dans mes bras, puis tout s'est désamorcé. 


Bon elle s'est représentée souriante, ça va, quand même =)

Ça ne marche pas toujours aussi bien. Mais des fois, c'est chouette.

Le problème c'est que, souvent, conserver son calme dans des situations de crise (enfant qui tape, qui ne supporte pas la frustration, etc) apparaît comme un cruel manque d’autorité. Personnellement, j’ai cessé d’essayer de me justifier auprès des gens qui s’insurgent et lançent à tout-va des « A ta place, je n’aurais pas laissé passer ça. » On peut prévoir tant qu’on veut, se promettre des choses, en affirmer d’autres, rien ne se passe jamais comme on l’avait planifié. Moi, je préfère mille fois montrer à ma fille qu’on peut rester calme dans toutes les situations, plutôt que répondre par la violence verbale ou la punition juste pour montrer que c’est moi la patronne et être approuvée par l'entourage. Tant pis pour ceux qui désapprouvent. Il y en aura toujours.

Bref.
Je suis fatiguée, un peu.
Mais je crois toujours en l'éducation bienveillante.
Et je n'échangerais ma place pour rien au monde.